Dallakyan rappelle également la récente déclaration du président russe Vladimir Poutine, qui, selon elle, constituait essentiellement une nouvelle accusation à l’encontre des anciennes autorités.
La politologue Lilit Dallakyan souligne la nécessité d’un débat ouvert en Arménie, afin que la population soit informée des négociations concernant la question du Haut-Karabakh. Elle s’exprime à ce sujet dans une interview accordée à Haykakan Zhamanak, revenant sur l’invitation du Premier ministre Nikol Pashinyan à débattre avec les anciens présidents, une invitation que ces derniers ont refusée.
« Certains prétendent que le Haut-Karabakh était quasiment indépendant et qu’il a été cédé. Mais en examinant la réalité, on se souvient que, par exemple, Serzh Sargsyan déclarait depuis la tribune du Parlement que l’Azerbaïdjan formulait sans cesse de nouvelles exigences, rendant impossible une solution. Avant la révolution, il avait même affirmé que l’Azerbaïdjan se préparait à la guerre », rappelle Dallakyan.
Elle critique également la manière dont certains transfèrent le débat sur un terrain personnel, jugeant cela indigne d’un ancien président : « Si vous avez des choses à dire, venez débattre et dites-les. Nikol Pashinyan est aujourd’hui à la tête du pays, il n’y a donc pas d’incompatibilité de fonction qui empêcherait Levon Ter-Petrosyan, par exemple, de participer à un débat. Leur refus affectera leur réputation, car si Pashinyan se trompe, venez lui expliquer le contraire. Refuser de débattre donne l’impression que soit vous avez tort, soit vous avez quelque chose à cacher. »
Dallakyan rappelle également que des documents déclassifiés en 2023 par le Département d’État américain montrent que les co-présidents européens du Groupe de Minsk avaient proposé des solutions au Haut-Karabakh qu’on pourrait considérer aujourd’hui comme idéales. Selon elle, les anciens présidents doivent expliquer pourquoi et comment ces propositions ont été rejetées.
« Pourquoi Arkadi Ghukasyan a-t-il refusé ces propositions ? Pourquoi Levon Ter-Petrosyan s’est-il retiré ? Comment Robert Kocharyan est-il arrivé au pouvoir ? Le peuple arménien mérite des réponses à ces questions, et ces interrogations continueront à être soulevées. Travailler pendant six ans dans l’opposition en répétant simplement ‘capitulation, trahison’ sans rien expliquer est inacceptable », affirme-t-elle.
Concernant les accusations des trois anciens présidents à l’encontre de Nikol Pashinyan sur l’échec des négociations autour du Haut-Karabakh, Dallakyan souligne : « Il ne faut pas oublier que Levon Ter-Petrosyan, dans son célèbre article Guerre ou Paix, critiquait déjà les forces au pouvoir à l’époque, à savoir Robert Kocharyan et Serzh Sargsyan. Il les accusait de mener le pays à la guerre et déclarait que le problème du Haut-Karabakh ne pourrait pas être résolu en faveur de l’Arménie selon leurs conditions. »
Dallakyan mentionne également les récentes déclarations du président russe Vladimir Poutine, qu’elle qualifie de critiques envers les anciennes autorités arméniennes. « Poutine a reproché aux anciens dirigeants arméniens de ne pas avoir reconnu le Haut-Karabakh comme partie intégrante de l’Arménie, affirmant que, dans ce cas, la Russie aurait pu intervenir pour défendre le territoire. Que répondent-ils à cette accusation ? Il est facile d’appeler Nikol Pashinyan un ‘capitulan’, mais qu’ont-ils à dire à Poutine ? De plus, si ce dernier ment, pourquoi ne le dénoncent-ils pas ? Leur silence montre que la Russie a également déclaré qu’elle ne les soutiendrait pas. Que faisaient-ils alors ? Ils n’ont ni renforcé l’armée, ni construit des abris, détournant des milliards, et ils viennent maintenant accuser Pashinyan. »
Enfin, la politologue conclut que le peuple arménien a des questions légitimes pour les anciens présidents. « Ils croient peut-être qu’en discréditant Pashinyan, personne ne leur demandera de rendre des comptes. Mais ils se trompent lourdement. Ces questions leur seront posées, et ils n’ont pas de réponses qui soient en leur faveur ou en faveur de l’Arménie », conclut-elle.