Les anciennes autorités n’ont aucun droit de parler : ce sont leurs actions qui ont mis l’Arménie dans une situation telle que Nikol Pashinyan peut aujourd’hui prétendre qu’il n’avait aucun moyen de changer quoi que ce soit, puisque tout avait déjà atteint un point de non-retour. Même Serzh Sargsyan, à son époque, comprenait la probabilité d’une guerre, ce qui explique pourquoi il n’a pas été autorisé à choisir une destinée alternative pour l’Arménie.
Le journaliste Narek Kirakosyan s’est entretenu avec Aram Sargsyan, président du parti “République” et ancien Premier ministre de l’Arménie. L’entretien a abordé de nombreuses questions régionales, notamment celles relatives à l’Artsakh, au corridor de Meghri, ainsi qu’aux attitudes et actions des gouvernements arméniens actuels et passés sur ces sujets.
Réagissant aux déclarations répétées d’Ilham Aliev concernant le retrait des observateurs de l’UE des frontières arméno-azerbaïdjanaises ou la dissolution du Groupe de Minsk, Aram Sargsyan a souligné que ces questions relèvent des affaires internes de l’Arménie. Il a ajouté qu’il ne revient pas à l’Azerbaïdjan d’intervenir ni à Nikol Pashinyan de décider seul du sort du Groupe de Minsk, fondé pour traiter de l’autodétermination de l’Artsakh, selon les termes mêmes de ses créateurs.
Aram Sargsyan a également largement évoqué les négociations après 1994, affirmant que l’indépendance de l’Artsakh n’a jamais été réellement discutée. La seule fois où cela a été envisagé, c’était dans le cadre d’un échange de Meghri contre Latchin, ce qui n’a finalement pas eu lieu. Il a invité l’ancien ministre des Affaires étrangères, Vardan Oskanian, à raconter ce qui s’est passé lors de sa rencontre avec le secrétaire d’État américain, où il a demandé le retrait de l’option de Key West, sous prétexte qu’elle ne représentait pas la position arménienne mais celle de la Russie.
Concernant le corridor de Syunik, appelé par l’Europe “corridor médian” et par la Chine “Une ceinture, une route”, Aram Sargsyan a rappelé que ce projet a été laissé en héritage par Robert Kotcharian, quelques jours avant de quitter ses fonctions, pour maintenir ses liens avec les autorités russes. Cette même logique de “chimie” avec la Russie a conduit ses successeurs à transformer l’Arménie en une périphérie russe.
Durant son mandat, Aram Sargsyan, ayant pris connaissance de l’option de Meghri, en a informé uniquement le Catholicos sous le sceau de la confession. Il s’est interrogé sur la manière dont l’Arménie comptait résoudre ces questions si la population n’était pas informée des négociations.
Selon lui, l’indépendance de l’Arménie est une valeur suprême, qu’aucun prix ne saurait surpasser ou remettre en question. “L’Arménie peut perdre ou conquérir de nouveaux territoires, mais cela perd tout son sens si nous n’avons pas d’indépendance.” Il a dénoncé les anciennes autorités qui ont mis en péril cette indépendance pour préserver leurs relations avec la Russie, transformant l’Arménie en une province.
Enfin, il a souligné que, contrairement à des millions de Kurdes en Turquie qui luttent pour leur indépendance sans succès, l’Arménie doit comprendre et chérir son statut d’État indépendant, sans jamais le mettre en doute, quelles que soient les circonstances.