La deuxième phase des travaux de rénovation du Mémorial et du Musée-Institut du Génocide des Arméniens est en cours. Le projet vise à moderniser les installations et à améliorer l’expérience des visiteurs tout en préservant l’intégrité historique du site.

Ces travaux suscitent toutefois de vives critiques. Des dalles en bon état sont arrachées pour être remplacées par de l’asphalte, ce que beaucoup interprètent comme une dépense injustifiée, voire un détournement de fonds. Certains dénoncent un sacrifice du patrimoine, alors qu’une simple rénovation ciblée aurait suffi, surtout quand d’autres projets, comme la partie supérieure du Cascade, restent inachevés.

Une polémique politique et mémorielle

La controverse prend de l’ampleur dans un contexte déjà tendu. En janvier 2025, lors d’une rencontre avec la diaspora en Suisse, Nikol Pashinyan a déclaré qu’il fallait « revenir sur l’histoire du génocide des Arméniens », interroger « ce qui s’est passé, pourquoi, comment nous l’avons perçu et à travers qui », allant jusqu’à questionner l’absence d’un agenda sur le génocide en 1939 alors qu’il aurait émergé « seulement dans les années 1950 ».

Ces propos, jugés choquants, ont été interprétés comme une remise en cause du caractère incontestable du génocide des Arméniens, parfois rapprochée des narratifs négationnistes turcs. Face à la polémique, Pashinyan a réaffirmé que « le génocide des Arméniens est un fait indiscutable et indéniable », expliquant vouloir susciter une réflexion et non relativiser l’événement.

D’autres voix dans le camp gouvernemental ont également choqué. Arsen Torosyan, membre du parti Contrat civil, a récemment affirmé : « nous ne devons pas parler de l’Arménie occidentale mais de la Turquie orientale ». Une formule perçue comme une tentative de gommer une dimension essentielle de la mémoire arménienne.

Ces déclarations s’ajoutent au projet de révision constitutionnelle qui supprimerait la référence à la Déclaration d’indépendance, dans laquelle la reconnaissance internationale du génocide était posée comme un principe fondamental de la politique étrangère arménienne. Autant d’éléments qui nourrissent la crainte d’un glissement politique dans la gestion de la mémoire.

Mémoire, modernisation et vigilance citoyenne

Les responsables du musée défendent les travaux comme une action de préservation durable et de valorisation pédagogique. Pourtant, les premières images du chantier — notamment l’arrachage des dalles de Tsitsernakaberd — suscitent un malaise. Était-il vraiment nécessaire de détruire ce qui ne nécessitait qu’une rénovation ciblée ?

Au-delà du chantier, une question centrale s’impose : la mémoire nationale doit-elle être soumise à des choix techniques et politiques discutables ? La société civile insiste sur la nécessité pour les citoyens de rester intransigeants quant à la nature des travaux et à l’utilisation des fonds publics. Car le Mémorial du Génocide des Arméniens n’est pas un site comme les autres : il est le cœur de la mémoire arménienne.

— Arménie Info

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