Par Jacques Raffy Papazian

Le compte à rebours est lancé, l’Arménie se trouve désormais dans une situation inconfortable où le jeu des grandes puissances la pousse à choisir entre une Arménie russe ou une Arménie démocratique tournée vers l’occident. l’Arménie se situe désormais à la frontière des deux mondes.

Le blocage de la route de Latchin est la dernière étape avant une nouvelle guerre annoncée, l’Azerbaïdjan exige désormais que la population arménienne d’Artsakh soit intégrée à l’Azerbaidjan, la Russie veut toujours prendre le contrôle du corridor au Siyunik que le dictateur Aliyev appelle « le corridor du Zangezur ».

L’Iran soutient l’intégrité territoriale de l’Arménie pour protéger ses intérêts de sécurité. L’enjeu de cette frontière Arménie-Iran est important pour l’Occident, qui prévoit un corridor routier Nord-Sud, reliant l’Inde, l’Iran, l’Arménie, la Géorgie, la Bulgarie pour alimenter économiquement l’Union Européenne, ces projets conduisent au conflit global actuel.

La Russie peut-elle vraiment prendre le contrôle d’un axe routier financé par l’Union européenne, la banque mondiale, le FMI ? Évidemment que non. À l’origine, cet axe reliait même la Géorgie à la Russie, par les financements russes, mais l’appétit expansionniste du président Poutine ralentit ce projet qui aboutira quoiqu’il arrive.

Pour comprendre ces grands changements, il est impératif d’élargir le spectre et prendre en compte les objectifs globaux. La rivalité des deux blocs de gérance mondiale que sont les États-Unis et l’UE face à la Russie sera maintenue. Le système démocratique face au système totalitaire restera inchangé, même en cas de fin de régime du président Poutine.

Dans la future gouvernance mondiale, l’équilibre des forces face à la Chine, nécessite que l’Inde soit forte, ce nouvel axe stratégique Nord-Sud va établir économiquement cet équilibre des forces mondiales. La Chine face à l’Inde, l’Iran face à la Turquie, l’Arménie face à l’Azerbaïdjan.

C’est la raison pour laquelle les puissances régionales dans le Caucase, la Russie, la Turquie et l’Azerbaïdjan veulent garder le contrôle sur cette région, voyant d’un mauvais œil, l’émergence et la sortie des pays alliés des sphères d’influence russe pour s’émanciper, évidemment soutenue par l’occident.

L’Arménie est la clé des processus démocratiques dans le Caucase et doit accomplir ses tâches : elle doit propager la démocratie dans le Caucase, à commencer par l’Iran, puis en Azerbaïdjan via l’Artsakh, en effet dans ce jeu global, l’Arménie jouera un rôle civilisationnel et économique, elle deviendra le portal entre le monde démocratique et totalitaire, la « Suisse » du Caucase.

Pour atteindre cet objectif, l’Arménie doit sortir des relations alliées avec la Russie, purifier l’intérieur de ses institutions gangrenées par les procédés du système totalitaire russe.

Promouvoir la liberté démocratique sur l’ensemble des peuples. Les Arméniens par leur histoire sont les seuls capables d’accomplir ces processus, ils restent les rois de la communication mondiale, un héritage qui perdure depuis des siècles. L’idéologie libertaire est ancrée dans l’ADN des Arméniens, depuis la création, ce qui nous rend unique et indispensable dans cette tâche.

La pression de la Russie et de l’Azerbaïdjan avec les blocages du corridor de Latchin est un dernier avertissement pour neutraliser les processus. « L’ours sentant que ses oursons s’échappent devient agressif. »

Si l’on analyse de près, Aliyev aurait pu frapper militairement avec l’accord de la Russie, mais Aliyev a décidé de changer de tactique en utilisant des pseudo-écologistes, le terme « écologiste » adresse évidemment un message direct à l’occident. Quel mouvement écologiste existe en Azerbaïdjan ? Aucun.

Aliyev est conscient que les menaces de l’ONU et de la CEDH peuvent le conduire à sa fin de règne en cas d’attaque militaire sur l’Arménie.

Les processus se retourneront contre Aliyev, celui-ci pourrait avoir son peuple face à lui, de manière similaire aux mouvements démocratiques en Iran.

Notre peuple a été capable de faire une révolution sans qu’aucune goutte de sang ne coule, nous pouvons éviter la guerre de la même manière.

Seule une mobilisation unitaire, Arménie, Artsakh, Diaspora est capable de relever ce défi. Voilà pourquoi la division interne s’intensifie en Arménie, nous sommes proches de ce moment, la situation durcie.

Mais c’est notre seule issue gagnante, pour garder l’Arménie démocratique sous protectorat de l’occident, l’inverse avec le maintien des Russes sera la perte de la frontière Arménie-Iran, avec beaucoup de morts et un enclavement encore plus important, qui nous obligera à terme de rejoindre la Fédération de Russie ou au mieux un statut comme le « Tatarstan » que promouvaient certains dirigeants pro russes.

Ce fameux choix revient sans cesse dans notre histoire « la liberté ou la mort ».

Jacques Raffy Papazian, secrétaire général du Mouvement Arménien

By Raffy

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